le dimanche, 6 novembre, 2016
Cher Enrique,
J’étais bien content de te rencontrer à la réunion de l’Oulipo ; déçu aussi
de ne pas avoir pu mieux communiquer avec toi — j’avais du mal à te comprendre
et je ne voulais pas être obligé à te demander sans arrêt à répéter ce que tu venais
de me dire. On va certainement pouvoir se rattraper dans une occasion plus
tranquille.
Tu m’a fait cadeau de ton Paris ne finit jamais, dont je te remercie ; mais ce
mot est insuffisant, car le livre m’a à la fois bouleversé et enchanté. La surprise
et le plaisir m’ont accompagné main dans la main pendant sa lecture : être
novateur même vis-à-vis des autres novateurs, c’est du panache suprême. J’ai
guetté tes maitres et modèles sans succès (à part un reflet momentané et sans
doute illusoire du Blanchot de l’Arrêt de mort ; il ne s’est pas renouvelé). Ce
livre est le premier de toi que j’ai lu ; il est loin d’être le dernier.
(Je dois pourtant te signaler une faute, et pas des moindres. Ce que John
Ashbery a dit de Paris est ceci : “Après avoir vécu à Paris, il est impossible de
vivre nulle part, y compris Paris”. “Nulle part” plutôt que ”ailleurs”. (Je me suis
donné la peine de vérifier la chose au téléphone avec John lui-même.) C’est non
seulement différent, c’est mieux !)
Bien à toi,
Harry
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