SERGIO PITOL, VISTO POR ‘LE MONDE’ (texto íntegro)

Xalapa 0El pasado lunes 23 de abril Le MONDE publicó una extensa nota sobre la vida y obra de Sergio Pitol.  Dado que el acceso a la nota era parcialmente de pago, ofrecemos aquí el texto íntegro del diario francés. (En la foto: Vila-Matas, Sergio Pitol, Victoria De Stefano y  Marcos Giralt Torrente en Xalapa)

 par Xavier Houssin:

Le grand écrivain mexicain Sergio Pitol est mort jeudi 12 avril à l’âge de 85 ans dans sa maison de Xalapa, la capitale de l’Etat de Veracruz. Il a succombé au noir chaos d’une longue aphasie progressive. Il a été incinéré le lendemain dans la plus stricte intimité, un conflit concernant sa dépendance opposant depuis plusieurs années sa famille et ses autres proches. « Un romancier, écrivait-il, est quelqu’un qui entend des voix à travers les voix. (…) Sans elles, il se sentirait perdu. Il trace la carte de sa vie en leur compagnie. Il sait que quand il ne pourra plus le faire, l’heure de sa mort sera venue, pas la mort définitive mais la mort en vie, le silence, l’hibernation, la paralysie, ce qui est infiniment pire. »

Frappé par une attaque cérébrale à l’automne 2006, quelques mois après avoir reçu le prix Cervantès, il s’était progressivement mis en retrait et avait cessé d’écrire. Il ne maîtrisait plus que sa langue maternelle. Cette blessure de la mémoire apparaissait d’autant plus injuste que, grand voyageur, diplomate, Sergio Pitol parlait, avant, couramment l’anglais, le français, l’italien, le russe, le polonais. Et que parallèlement à l’écriture de ses propres livres, il avait été un traducteur prolifique. Faisant découvrir en espagnol les textes de James Conrad, de Malcolm Lowry, d’Henry James, de Giorgio Bassani, de Tibor Déry, de Jerzy Andrzejewski, de Witold Gombrowicz, de Boris Pilniak et de bien d’autres encore.

 Lire, faire lire, tenait pour lui d’une nécessité absolue remontant à une enfance douloureuse. Né dans une famille aisée, le 18 mars 1933 à Puebla, au sud de Mexico, il avait perdu très jeune son père, sa mère, sa sœur. Le petit orphelin, élevé par sa grand-mère, était de santé fragile. Atteint par la malaria, il ne pouvait pas aller à l’école et restait solitaire et reclus. Mais la maison était pleine de livres. Les lectures seront son apprentissage. « A 12 ans, racontera-t-il, j’ai découvert Guerre et Paix et j’ai cessé d’être malade. Je reste encore persuadé que Tolstoï m’a sauvé. »

Après des études de droit et de philosophie, il fera paraître ses premières nouvelles à la fin des années 1950 dans Estaciones, la revue littéraire du poète Elias Nandino. Sa trentaine de romans, de nouvelles, de récits (il a été aussi essayiste et critique d’art), forment une œuvre où se bousculent les souvenirs vrais et réinventés, la dérision, l’étrange. Il parodie, joue de la méprise, du quiproquo, des complications de l’âme, du hasard. Enrique Vila-Matas dans la préface très intime qu’il fait de Los Mejores Cuentos, dernier texte de Pitol édité en français sous le titre La Panthère et autres contes (La Baconnière, 2017), parle de son « humour mexicain libre et cruel, fantastique et exemplaire ».

 Au regard de sa production littéraire, il aura finalement été assez peu traduit chez nous. Son premier roman El tañido de una flauta (1972) est sorti au Seuil en 1990 sous le titre Les Apparitions intermittentes d’une fausse tortue. Le Seuil avait déjà publié en 1989 Parade d’amour, qui forme avec Mater la divine garce (Gallimard, 2004) et La Vie conjugale (Gallimard, 2007) l’acide Triptico del carnaval. On découvrira ensuite ses journaux et Mémoires enchevêtrés, troublants : L’Art de la fugue (Passage du Nord-Ouest, 2005) et Le Voyage (Les Allusifs, 2003). Et, enfin, le recueil de nouvelles, Nocturne de Boukhara (Les Allusifs, 2007).

Sergio Pitol s’était embarqué en 1961 pour un vagabondage qui aura duré près de trente ans et qui l’a conduit des Etats-Unis à la Chine : en Italie, en Espagne, en France, en Angleterre et de l’autre côté du rideau de fer jusqu’en URSS. Il y a vécu de cours, de traductions et a occupé des postes diplomatiques (il fut attaché culturel à Belgrade, à Varsovie, à Paris, à Budapest, à Moscou, avant d’être nommé ambassadeur du Mexique à Prague). Un de ses tout derniers déplacements à l’étranger a été pour la France. Bien que fatigué et affaibli, il avait tenu à être présent au grand colloque international sur son œuvre organisé par l’université de Bordeaux : « Voyager et écrire ! Activités toutes deux marquées par le hasard ; le voyageur et l’écrivain n’ont que la certitude du départ. Aucun des deux ne sait vraiment ce qui lui arrivera en chemin. »

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